Belle aventure en face nord du Gelas
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Belle aventure en face nord du Gelas
17 Juillet 1864,
le comte Paolo di san Robert accompagné de son frère, d'un ami et de ses guides atteignent la cime Nord du Gelas, 3143m par le couloir Est. Un sentiment de liberté total a du les envahir en contemplant les vallées autour, la grande plaine du Po et son habituelle Nebbia, la belle face sud ouest du Mont Clapier, la grande muraille de L'Argentera.
Sans vouloir me comparer à ces grands hommes qui ont fait preuve de tant de courage et de détermination pour explorer les montagnes au XIXème siècle avec le peu de matériel et sans accès facile, je crois que ce jour, en arrivant enfin au sommet de cette petite bute de neige, ce fameux sentiment de liberté absolue et de travail accompli m'envahi également.
L'histoire commence il y a quelques jours. Fin des partiels, dans ces moments, choisir quelle course faire en montagne c'est un peu comme faire les courses au supermarché quand on a faim.
Il a fait plutôt chaud cette semaine mais la météo annonce un bon coup de froid pour vendredi soir. N'étant pas un grand fanatique de la neige molle et pourrie de fin de printemps, mon choix s'oriente vers une face nord assez haute en altitude. Pourquoi pas la face nord du Gelas? David d'AlpesSud a justement fait une sortie il y a quelques jours au couloir des Italiens, ça a l'air en très bonnes conditions.
Assez peu d'informations et de photos sont disponibles pour cette face. je sais néanmoins qu'une barre rocheuse d'une 100ène de mètre de haut sépare deux grandes pentes de neige en face nord. Il y a peut être possibilité de faire quelque chose labas... Le mieux reste encore d'aller voir.
Pour ceux qui ne connaissent pas, voila une très belle photo de monsieur Thaon de cette fameuse face nord.
Cette fois ci c'est Aloys Reymondet qui m'accompagne, un junior du groupe Espoir CAF06. Seulement 17 ans mais de belles grandes courses à son actif comme la traversée Berhault au Viso ou Cold Couloir à Cogne. Un jeune qui a clairement de l'avenir dans le milieu.
Vendredi soir nous bivouaquons donc au parking en bas du refuge. Petit diner, le renard aura lui aussi droit à des morceaux de Beaufort...
Reveil à 2h00, la météo annonce une franche dégradation vers 14h, on veut profiter du meilleur créneau.
La neige est assez abondante dès les premiers lacets du chemin, parfois bon regel, parfois impossible de faire 1m dans s'enfoncer jusqu'à mi cuisse. Heureusement qu'on a les raquettes...
Marcher dans le noir, une nuit sans lune, a quelque chose de relaxant. Ma silhouette se dessine de temps en temps devant moi tel un fantôme qui nous guide lorsque Aloys tourne la tête vers moi en marchant. il n'y a aucun bruit, seulement l'eau qui couloir au loin dans les torrents.
Aucun chamois non plus, la neige trop abondante de cette année a du les obliger à descendre plus bas dans la vallée.
On s'équipe avant le Collet du St Robert. La face Ouest du Gelas dans les premières lueurs du jour.
La goulotte Berhault Stakano à l'air en conditions.. à voir
Aloys rejoint le Collet du St Robert, déjà 1100m de D+
Quelques belles lignes de glace sont formées dans la face Ouest, je doute mais finalement je me dis qu'il faut mieux rester sur notre projet de la face nord et que ces lignes sont trop fines.
L'éternelle brume de la plaine du Po.
Aloys descend dans la combe en direction du forcella roccati, une brèche dans la crète de la Mora 520m plus bas.
La neige est très mauvaise dans la descente, on s'enfonce beaucoup c'est pénible.
Le soleil se lève sur l'Argentera et ses voisins.
Non mais franchement, même si on en chie comme des russes, on n'est pas bien la?!
La vue depuis la brèche vers le refuge Soria
Petit à petit, la fameuse face nord se dévoile ! Il y a effectivement une magnifique coulée de glace, mon intuition était bonne !
ça a l'air bien épais, parfait !
alors que cette merveille nous tend les bras, on a l'impression de ne pas avancer dans cette interminable pente à 30° que nous devons remonter sur près de 400m.
Enfin on s'engage dans la goulotte, la neige est bien dure et il y a beaucoup de glace en bas.
très encaissée par endroit il y a beaucoup d'ambiance. Malheureusement ça protège plutôt mal dans ce rocher pourri... seulement 3 bons points pour 60m dans cette première longueur en M3+.
Encore un joli petit ressaut, la neige dure est un peu pète mollets.
je trouve une bonne fissure pour faire un excellent relais sur un n°1 + un n°3, important pour la suite parce que j'ai l'impression que la longueur raide ne va pas trop se protéger non plus...
Aloys dans la longueur
C'est bon de retrouver ces conditions !
Alors content?
puis la fameuse longueur clé. D'abord un ressaut de 5m en M4, glace fine qui sonne bien creux, impossible de mettre une broche.
après un "replat" à 70°, se dresse la cascade finale, haut de 8 à 9m, verticale à léger dévers par endroits à cause des stalactites. J'essaie tant bien que mal de me protéger en mettant des broches mais celles-ci s'enfoncent comme dans du granité... visiblement c'est pas le moment d'apprendre à voler.
Je commence à grimper cette section raide, la glace est un peu plus épaisse qu'en bas mais ça sonne un peu creux quand même, mieux vaut ne pas trop taper.
Parfois inconsistante, parfois cassante, il faut vraiment grimper avec finesse.
Mais finalement, pieds en écart, l'affaire ne passe pas trop mal même avec le sac sur le dos. ça vaut sans doute un bon M5+, bien plus difficile que le ressaut raide du couloir Ouest de la baisse du Pelago en comparaison.
Au sommet de la cascade, l'ambiance est bien présente !
Je suis bien content de rejoindre la pente supérieure. Malheureusement il n'y a plus de rocher ni de glace, pas de quoi faire le relais... à moins que...
et hop ! les pioches bien enterrées à 60cm, un magnifique relais béton sur corps mort. la neige bien dure assure une bonne résistance.
Alo grimpera la longueur sans tomber, bravo à lui !
Il reste encore environ 100m de pente à 35/ 40°. On est bien entamés et on avance vraiment lentement.
Heureusement, la météo tient le coup, il fait encore beau.
en face nord, du givre recouvre les rochers, c'est très beau, on dirait un peu les fameux champignons de neige de Patagonie.
Aloys fait les derniers mètres de trace qui nous sépare du sommet, je suis totalement éclaté.
Arrivé en haut, je m’effondre la tête contre la neige pour reprendre mon souffle, j'ai l'impression d'être à 6000m. Quel bon cardio ha ha
La vue est sublime, l'ambiance aussi.
On entend des bruits d'outre tombe qui proviennent d'un couloir du décharge plus bas.
La famille Blanc, Fred le papa et Raf le fiston, nous rejoignent au sommet, eux ont fait le couloir ouest.
Raffael a aussi 17 ans et lui aussi a un beau palmarès derrière lui avec beaucoup de sommets dans la Vanoise, les Ecrins et le Mercantour. ça fait plaisir de retrouver des gens qu'on connait sur ce beau sommet !
Aloys, Fred et son fils au sommet du Mont Blanc, Heu non pardon, du Gelas ! L'importante couche de neige recouvre la croix !
Après une bonne pause de 30 minutes au sommet, on descend par le couloir Est, bien large cette année.
De nombreux skieurs profitent des excellentes conditions;
On descend vers les lacs Balaour et le Vallon Cabret, quasiement toutes les pentes en mode luge.
µ
Alo a trouvé une bonne méthode de descente !!
Enfin en bas... la météo est vraiment correcte !
Aloys est lui aussi bien fatigué, après 13h et plus de 2000m de D+...
Une super aventure dont je me souviendrai longtemps !! également un honneur et un privilège de pouvoir ouvrir sur ce beau sommet. Il s'agit je pense, très probablement d'une première, en vue de la quantité de blocs branlants qu'on a trouvé dans la goulotte et du caractère éphémère de la ligne. Dans tous les cas, ça reste une belle voie.
Le topo ! il sera aussi sur Denali Sud Alpinisme
à plus !
Gary
le comte Paolo di san Robert accompagné de son frère, d'un ami et de ses guides atteignent la cime Nord du Gelas, 3143m par le couloir Est. Un sentiment de liberté total a du les envahir en contemplant les vallées autour, la grande plaine du Po et son habituelle Nebbia, la belle face sud ouest du Mont Clapier, la grande muraille de L'Argentera.
Sans vouloir me comparer à ces grands hommes qui ont fait preuve de tant de courage et de détermination pour explorer les montagnes au XIXème siècle avec le peu de matériel et sans accès facile, je crois que ce jour, en arrivant enfin au sommet de cette petite bute de neige, ce fameux sentiment de liberté absolue et de travail accompli m'envahi également.
L'histoire commence il y a quelques jours. Fin des partiels, dans ces moments, choisir quelle course faire en montagne c'est un peu comme faire les courses au supermarché quand on a faim.
Il a fait plutôt chaud cette semaine mais la météo annonce un bon coup de froid pour vendredi soir. N'étant pas un grand fanatique de la neige molle et pourrie de fin de printemps, mon choix s'oriente vers une face nord assez haute en altitude. Pourquoi pas la face nord du Gelas? David d'AlpesSud a justement fait une sortie il y a quelques jours au couloir des Italiens, ça a l'air en très bonnes conditions.
Assez peu d'informations et de photos sont disponibles pour cette face. je sais néanmoins qu'une barre rocheuse d'une 100ène de mètre de haut sépare deux grandes pentes de neige en face nord. Il y a peut être possibilité de faire quelque chose labas... Le mieux reste encore d'aller voir.
Pour ceux qui ne connaissent pas, voila une très belle photo de monsieur Thaon de cette fameuse face nord.
Cette fois ci c'est Aloys Reymondet qui m'accompagne, un junior du groupe Espoir CAF06. Seulement 17 ans mais de belles grandes courses à son actif comme la traversée Berhault au Viso ou Cold Couloir à Cogne. Un jeune qui a clairement de l'avenir dans le milieu.
Vendredi soir nous bivouaquons donc au parking en bas du refuge. Petit diner, le renard aura lui aussi droit à des morceaux de Beaufort...
Reveil à 2h00, la météo annonce une franche dégradation vers 14h, on veut profiter du meilleur créneau.
La neige est assez abondante dès les premiers lacets du chemin, parfois bon regel, parfois impossible de faire 1m dans s'enfoncer jusqu'à mi cuisse. Heureusement qu'on a les raquettes...
Marcher dans le noir, une nuit sans lune, a quelque chose de relaxant. Ma silhouette se dessine de temps en temps devant moi tel un fantôme qui nous guide lorsque Aloys tourne la tête vers moi en marchant. il n'y a aucun bruit, seulement l'eau qui couloir au loin dans les torrents.
Aucun chamois non plus, la neige trop abondante de cette année a du les obliger à descendre plus bas dans la vallée.
On s'équipe avant le Collet du St Robert. La face Ouest du Gelas dans les premières lueurs du jour.
La goulotte Berhault Stakano à l'air en conditions.. à voir
Aloys rejoint le Collet du St Robert, déjà 1100m de D+
Quelques belles lignes de glace sont formées dans la face Ouest, je doute mais finalement je me dis qu'il faut mieux rester sur notre projet de la face nord et que ces lignes sont trop fines.
L'éternelle brume de la plaine du Po.
Aloys descend dans la combe en direction du forcella roccati, une brèche dans la crète de la Mora 520m plus bas.
La neige est très mauvaise dans la descente, on s'enfonce beaucoup c'est pénible.
Le soleil se lève sur l'Argentera et ses voisins.
Non mais franchement, même si on en chie comme des russes, on n'est pas bien la?!
La vue depuis la brèche vers le refuge Soria
Petit à petit, la fameuse face nord se dévoile ! Il y a effectivement une magnifique coulée de glace, mon intuition était bonne !
ça a l'air bien épais, parfait !
alors que cette merveille nous tend les bras, on a l'impression de ne pas avancer dans cette interminable pente à 30° que nous devons remonter sur près de 400m.
Enfin on s'engage dans la goulotte, la neige est bien dure et il y a beaucoup de glace en bas.
très encaissée par endroit il y a beaucoup d'ambiance. Malheureusement ça protège plutôt mal dans ce rocher pourri... seulement 3 bons points pour 60m dans cette première longueur en M3+.
Encore un joli petit ressaut, la neige dure est un peu pète mollets.
je trouve une bonne fissure pour faire un excellent relais sur un n°1 + un n°3, important pour la suite parce que j'ai l'impression que la longueur raide ne va pas trop se protéger non plus...
Aloys dans la longueur
C'est bon de retrouver ces conditions !
Alors content?
puis la fameuse longueur clé. D'abord un ressaut de 5m en M4, glace fine qui sonne bien creux, impossible de mettre une broche.
après un "replat" à 70°, se dresse la cascade finale, haut de 8 à 9m, verticale à léger dévers par endroits à cause des stalactites. J'essaie tant bien que mal de me protéger en mettant des broches mais celles-ci s'enfoncent comme dans du granité... visiblement c'est pas le moment d'apprendre à voler.
Je commence à grimper cette section raide, la glace est un peu plus épaisse qu'en bas mais ça sonne un peu creux quand même, mieux vaut ne pas trop taper.
Parfois inconsistante, parfois cassante, il faut vraiment grimper avec finesse.
Mais finalement, pieds en écart, l'affaire ne passe pas trop mal même avec le sac sur le dos. ça vaut sans doute un bon M5+, bien plus difficile que le ressaut raide du couloir Ouest de la baisse du Pelago en comparaison.
Au sommet de la cascade, l'ambiance est bien présente !
Je suis bien content de rejoindre la pente supérieure. Malheureusement il n'y a plus de rocher ni de glace, pas de quoi faire le relais... à moins que...
et hop ! les pioches bien enterrées à 60cm, un magnifique relais béton sur corps mort. la neige bien dure assure une bonne résistance.
Alo grimpera la longueur sans tomber, bravo à lui !
Il reste encore environ 100m de pente à 35/ 40°. On est bien entamés et on avance vraiment lentement.
Heureusement, la météo tient le coup, il fait encore beau.
en face nord, du givre recouvre les rochers, c'est très beau, on dirait un peu les fameux champignons de neige de Patagonie.
Aloys fait les derniers mètres de trace qui nous sépare du sommet, je suis totalement éclaté.
Arrivé en haut, je m’effondre la tête contre la neige pour reprendre mon souffle, j'ai l'impression d'être à 6000m. Quel bon cardio ha ha
La vue est sublime, l'ambiance aussi.
On entend des bruits d'outre tombe qui proviennent d'un couloir du décharge plus bas.
La famille Blanc, Fred le papa et Raf le fiston, nous rejoignent au sommet, eux ont fait le couloir ouest.
Raffael a aussi 17 ans et lui aussi a un beau palmarès derrière lui avec beaucoup de sommets dans la Vanoise, les Ecrins et le Mercantour. ça fait plaisir de retrouver des gens qu'on connait sur ce beau sommet !
Aloys, Fred et son fils au sommet du Mont Blanc, Heu non pardon, du Gelas ! L'importante couche de neige recouvre la croix !
Après une bonne pause de 30 minutes au sommet, on descend par le couloir Est, bien large cette année.
De nombreux skieurs profitent des excellentes conditions;
On descend vers les lacs Balaour et le Vallon Cabret, quasiement toutes les pentes en mode luge.
µ
Alo a trouvé une bonne méthode de descente !!
Enfin en bas... la météo est vraiment correcte !
Aloys est lui aussi bien fatigué, après 13h et plus de 2000m de D+...
Une super aventure dont je me souviendrai longtemps !! également un honneur et un privilège de pouvoir ouvrir sur ce beau sommet. Il s'agit je pense, très probablement d'une première, en vue de la quantité de blocs branlants qu'on a trouvé dans la goulotte et du caractère éphémère de la ligne. Dans tous les cas, ça reste une belle voie.
Le topo ! il sera aussi sur Denali Sud Alpinisme
à plus !
Gary
GaryMountain- Nombre de messages : 184
Localisation : Nice
Points : 388
Date d'inscription : 15/10/2015
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